Si ça t'amuse, les voilà, mes propos (mais sans les images la pillule passera peut-être moins bien...):
Las Vegas Parano relate l'épopée mystique de deux compères: Raoul Duke, journaliste (Johnny Depp) et son énorme avocat Dr Z Gonzo (Benicio del Toro).
Partis couvrir un événement sportif (course de moto), ils profitent de jouir pleinement de celle qu'on appelle Sin City.
Mescaline, LSD, coke, éther, téquila, marijuana, extrait d'hypophyse... La valise est pleine. Et ils comptent bien la vider avant leur retour.
Au fur et à mesure du temps, on sent que la descente sera certes douce mais abyssale. On n'en voit pas le fond. Jusqu'où allons-nous aller tout ce temps? Et pourquoi? Quel est le fond du film? Les réponses viendront en temps et en heure.
Plongés dans un délire chaque fois différent (remarquablement décrit et traduit à l'image) les deux amis ne sortent plus la tête de l'eau et nous immergent totalement dans dans leur monde... Apocalyptique.
Abandonné aux trips, le spectateur est facilement désemparé et n'a pour seul refuge que la passivité. Il faut savoir se laisser porter pour que la magie opère. Certains ont en effet reproché un manque d'intérêt. Le long métrage n'est fait que d'hallucinations patogènes et de petites anecdotes... C'est vrai.
Mais ne ronnaît-on pas la grandeur et la force d'une oeuvre dans sa simplicité apparente? Cela ouvre en effet des interprétations très variées.
On a vu ainsi des auteurs démontrer que ce film était aussi une critique des médias, essentiellement télévisés. Dans chaque virée en chambrée hotelière, il y a une télé. Avec le son à fond et des images de violence qui défilent (notamment sur la guerre du vietnam qui bat son plein en 1971 et peine l'Amérique...). Peut être pour dénoncer l'omnipotence des médias télévisés ou inviter à pérenniser d'autres formes de journalisme (l'auteur du roman est d'ailleurs l'inventeur d'un nouveau style dont il fait ici l'apogée: le journalisme ultra-subjectif autrement appelé le journalisme-gonzo et qui consiste pour le journaliste à vivre les évenements qu'il relate)
Las Vegas Parano est aussi analysé comme une vive critique du rêve américain en perdition en 1971, où la jeunesse paraît compromise voire sans avenir .
La fin du flower power accompagné de la séparation des Beatles et d'une geurre qui fait mal (on trouve d'ailleurs pas mal de symboles comme l'utilisation du drapeau étoilé
pour le shoot à l'éther). Au milieu de tout ça, notre journaliste et son avocat s'adonnent à la culture du vice pour mieux comprendre ce qui les entoure. Las Vegas, la ville de tous les pêchés est leur lieu de pélerinage. Cette ville décriée comme l'allégorie de l'Amérique toute entière - nombriliste et qui se ment à elle-même - comme autant de lumières éclairant le jour... Comme si l'on voudrait faire oublier ce qui est trop visible... Une pancarte qui dit: "regardez ici"!
Et dans cette ville, deux jeunes délurés qui titubent dans les casinos ou chambres d'hotels. Le faux dans le faux. N'est-ce pas un moyen de retrouver le vrai? Si cette amérique se ment à elle-même, elle ment aussi à ces jeunes. S'échapper de ce mensonge par le mensonge peut-il être une solution?
On s'apperçoit également que les personnages principaux ne sont jamais en phase. Chacun est dans sa bulle. Ils ne partagent jamais le même délire. Ils sont à côté. Comme le spectateur est à côté. Comme l'Amérique et le rêve le sont.
Las Vegas parano est bourré d'insularité. Au final, qui trompe qui? Et quelle est la responsabilité des médias? Où sommes nous? Où allons-nous? Le monde n'est-il pas fou?
Ne pouvons nous pas nous permettre de perdre pied, de nous isoler dans ce monde qui a perdu sa dimension humanitaire? L'échappée belle? Certainement pas. Car si l'amérique perd ce qu'elle a d'humain, la nature vous rappellera à elle si vous en faîtes autant. Et si vous en avez trop pris, si vous avez abusé de votre mensonge, vous coulerez comme un caillou.
Se libérer d'un mensonge trop vaste et qui nous dépasse grace à son propre mensonge, aussi individuel et répugnant soit-il, n'est donc pas la solution.
Moralité: au moins, on peut choisir son mensonge et ne pas subir celui d'un
autre. Jeunesse, défonce-toi! Mais retrouve ton humanité et n'en fais pas trop pour ça... Car tu sais désormais où ça te mènera...
Voilà de quoi prendre peur, au risque d'être répugné de voir toute la merde dont est capable de produire l'humain et en devenir malade... Voire... Paranoïaque.
PS: A noter aussi que l'on apercoit dans le film le vrai Raoul Duke (oui il existe!) dans un bar entouré de femmes, johnny Depp dans son délire le regarde et dis "oh mais c'est moi!"