Content que ça te plaise P'tite Pomme ! Voila la suite alors. Ca y'est j'ai enfin mis l'adresse de mes blogs en signature si tu veux en savoir plus...
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Mes murs m’observent bizarrement, je ne sais pas pourquoi mais j’ai l’impression qu’ils se foutent de moi. Aurai-je fait le mauvais choix ? Non, ce n’est pas ma faute ! C’est la faute du candidat de tout à l’heure. Mais j’ai bien mémorisé son visage, si jamais je le recroise je lui ferai bien savoir qu’il a bousillé la plus belle relation de ma vie avec son ignorance.
La plus belle relation de ma vie, les choses ont pris une mauvaise allure récemment. On a tous les deux des trucs à se reprocher mais tout ce qu’on arrive à cracher c’est à propos de l’autre, pas de soi-même. Depuis quelques semaines j’aimerai bien prendre un peu de recul, mais comme on vient d’emménager ce n’est pas facile à expliquer. Je crois qu’elle pense comme moi, mais si elle vient me raconter des conneries comme quoi elle veut prendre du recul, je la rembarrerai directe. On vient d’emménager quand même !
Je commence à avoir mal à la tête, comme quand on réfléchit trop intensément. Peut-être que l’homme n’est pas fait pour réfléchir ? Je me lève sur un coup de tête et je file au bar d’à coté, sans même regarder l’épreuve de la mort subite. Ca fait longtemps que j’y suis plus allé seul, et puis je vais sans doute voir Nina...
Nina, pour l’anecdote, c’est la couveuse, celle qui m’a refilé cette saloperie, j’en suis sur. Elle n’est pas spécialement jolie, pas spécialement moche non plus d’ailleurs, mais elle dégage un certain charme dans sa manière d’être qui ne me laisse pas indifférent. Elle passe son temps accoudée au comptoir à boire un jus de fruit, chaque fois c’est un fruit différent, orange, pomme, citron, fraise, multivitaminé, je crois bien que c’est l’unique pilier de comptoir de France à boire ça. A force de rester à la même place elle a finit par connaitre tous les clients, même moi qui suis pas bavard pourtant.
Ce jour là je venais de m’engueuler avec Lucie, c’était à propos des taches ménagères je crois. Elle voulait que j’aille demander l’aspirateur chez le voisin, je lui ai répondu de le laisser tranquille le voisin, qu’il en avait sans doute marre de se faire emmerder pour un aspiro. Je l’aime pas beaucoup le voisin, il fait parti de ces gens qui ne savent pas parler d’autre chose que de politique, moi c’est un aspirateur que je veux, pas un débat.
Bref, ça a dégénéré notre histoire et j’ai fini tout seul au bar d’à coté. C’était la première fois qu’on se voyait sans Lucie, je suis resté assez flou sur ma relation avec elle je ne sais pas trop pourquoi. On a discuté un peu de tout et beaucoup de rien. Finalement on s’est un peu rapproché et c’est à ce moment que j’ai commis l’acte irréparable : elle m’a proposé de gouter le jus d’un fruit étrange et tropical et j’ai accepté en prétextant que je ne voulais pas mourir idiot.
Pourtant je suis un véritable maniaque là dessus, je ne supporte pas de boire dans la même bouteille ou le même verre que quelqu’un d’autre. On a trop de risque d’attraper des maladies, l’idée de penser à toutes ces gastro sur les bords de verres m’insupporte. Mais ce jour là j’ai succombé, sans doute qu’il n’y avait pas de que la curiosité de gouter un nouveau fruit, son sourire m’a empêché de réfléchir. Il faut dire qu’elle a un joli sourire.
Il n’y a qu’elle qui ait pu mettre ce fléau en moi, bizarrement je ne lui en veux pas trop, en fait tout m’est égal. J’ai décidé que l’humain ne pensait pas alors l’humain ne pensera pas ce soir.
Quand j’arrive au bar, elle est bien là, auréolée par la lampe du comptoir qui se tient juste au dessus de sa tête. Ses cheveux roux prennent un drôle d’éclat à cet endroit, je salue Greg le barman, je commande une pinte et je m’assoie à coté d’elle. Je n’aime pas trop être le premier à parler, alors je bois un peu, tout en me perdant dans les noms d’alcool originaire de tous les pays du monde qui ornent chaque espace, comme si tous les êtres humains du monde s’étaient levé comme un seul homme et me disaient : « t’es dans un bar alors tu consommes ». Il y’a peu de chose qui rapprochent les hommes aussi bien que ça.
Enfin, elle m’interpelle : « -Salut. T’es venu tout seul ?
-Ouais. On a des petits problèmes en ce moment…
-Quel genre ?
-Genre personnels.
-Ola ! Je n’veux pas t’embêter avec ça alors, dit-elle en faisant basculer son tabouret d’avant en arrière.
-En fait ça ne m’embête pas je… »
Je suis interrompu par le vibreur de mon téléphone, c’est une invention formidable ce truc, ça permet d’être le seul à savoir quand on vous appelle, ensuite il faut faire semblant de regarder l’heure. Je vois un nouveau message de Lucie : « Je dois réfléchir un peu, tu devrais en faire autant. Je dors chez une amie… ». J’éteins mon portable en me disant que je vais la faire mijoter une nuit et que je lui répondrais demain, le problème c’est que je mijote autant qu’elle. Ce n’est pas grave, si je souffre c’est qu’elle souffre aussi, du moins ça me rassure de l’espérer.
Je demande une autre bière, dans les films américains le héros picole toujours quand il touche le fond. C’est pas tellement que je touche le fond, c’est plutôt que j’aime bien les films américains.
Je balance mes pieds d’avant en arrière, d’abord les deux en même temps, puis l’un après l’autre, je ne sais pas trop quoi dire ni quoi faire. Il parait qu’il faut faire ça quand on reste trop longtemps assis, ça aide à la circulation du sang, du moins c’est ce qui est écrit sur le dépliant dans les avions. Je me sens comme dans l’avion, j’attends un truc, je sais ce que c’est, mais si je n’attends pas ça sera moins satisfaisant à l’arrivée.
Et puis je me décide, je tourne mon tabouret vers la rouquine et je lui demande :
« -T’es un peu malade en ce moment non ?
-Oui, t’es le premier à remarquer ! J’ai choppé la mononucléose. Comment t’as fais pour deviner ? »
Je me contente de répondre que je suis très observateur, elle parait étonnée et me lâche un de ses fameux sourires ravageurs. Je lui dis que j’aime bien quand elle sourit et je commande un Long Island au passage. Mais elle n’a pas oublié ce que je lui ai dit et me demande :
« Pourquoi, il est comment mon sourire ? »
On ne m’avait jamais dit ça avant, je lui tends la main et elle me bouffe le bras. Je dois improviser un compliment en vitesse :
« Il est rare et précieux, quand on en tient un il ne faut pas le laisser s’échapper, il faut le faire durer le plus longtemps possible. »
Elle me dit que ce n’est pas de moi, que je ne parle pas aussi bien. Je lui réponds que non, bien sur, que j’ai lu ça dans un bouquin débile qui m’a tenu compagnie dans le train. Je lui dis que j’aime faire des compliments, pas les mettre dans des paquets cadeaux.
Elle rigole et commande un jus de poire, je lui demande :
« C’était quoi le jus que tu m’as fait gouter la dernière fois ? C’était un fruit exotique avec un nom bizarre… »
Je lis sur son visage qu’elle a deviné, elle baisse les yeux puis les relève d’un air embarrassé, comme un enfant qui vient de casser un truc dont il ne connait pas le prix : « Papaye-mononucléose ? répond-elle »
Je commande un whisky et je lui réponds que je ne lui en veux pas, puis je remets en place une de ses mèches de cheveux qui virevolte. Je lui dis que je me sens bien ce soir, même si en vérité je commence à avoir du mal à tenir sur le tabouret, que grâce à ça j’ai compris des choses qui se passaient avec Lucie. Je lui dis que je suis très heureux d’être le seul à pouvoir l’embrasser dans cette salle. Finalement je l’embrasse.
En nous voyant, Greg le barman met deux doigts dans sa bouche et tape un gros sifflement du genre on a gagné la coupe du monde. Heureusement qu’il n’y a presque personne dans le bar, il se précipite pour nous offrir deux Tequila. Je n’en peux plus, je suis plein ! Quand il repart Nina me souffle « tu peux boire la mienne si tu veux, je n’aime pas ça ». C’est mon honneur qui est en jeu. Si les héros américains le font, y’a pas de raison que je ne le fasse pas, j’avale une Tequila, puis deux. Je prends mon manteau et je dis à Nina que je m’en vais, elle aussi veut rentrer chez elle.
On se raccompagne un peu en chemin, arrivés devant le métro je lui demande :
« -Tu veux venir à la maison cette nuit ?
-Est-ce-que tu tiens à moi, répond-elle, est-ce-que on se reverra ?
-Non, je tiens seulement à Lucie, je lui retiens la main quand elle veut s’en aller. Mais j’ai besoin d’affection ce soir, par ta faute j’en suis privé pour longtemps.
-Pourquoi j’accepterai si je sais que c’est tout ce que tu veux de moi ?
-Parce que tu veux la même chose. »
Elle me refait son sourire magique et remonte les quelques marches qui la séparaient de moi. Gagné !